Chapitre 20
AUTO-ANTICORPS ET MALADIES
SPECIFIQUES D’ORGANES
I – La cirrhose biliaire primitive
A
- Rappel clinique
Cette affection concerne dans 90 % des cas des femmes âgées de 35 à 60 ans. Elle peut rester asymptomatique pendant des décennies, se manifestant seulement par la découverte fortuite d'une élévation chronique des phosphatases alcalines plasmatiques. Puis survient un prurit, parfois localisé initialement à la paume des mains et à la plante des pieds avant de se généraliser. L'apparition d'une intense fatigue précède l'ictère puis, quelques années plus tard, la cirrhose avec hypertension portale, souvent compliquée d'ostéomalacie, d'ostéoporose et d'accidents hémorragiques.
Cette maladie, dont l'évolution chronique est très variable d'une malade à l'autre, peut revêtir un caractère de gravité tel qu'elle nécessite une transplantation hépatique. La cirrhose biliaire primitive peut être associée à une sclérodermie de type CREST, un syndrome de Gougerot-Sjögren, une thyroïdite de Hashimoto ou une anémie de Biermer.
B - Diagnostic biologique
Le diagnostic est suspecté sur une élévation chronique et croissante des phosphatases alcalines et des 5' nucléotidases puis des transaminases ASAT et ALAT. Il est confirmé par la détection d'auto-anticorps caractéristiques et la biopsie hépatique.
C - Diagnostic immunologique
Chez plus de 90% des malades atteints de CBP on détecte des auto-anticorps sériques IgG "anti-mitochondries de type 2" ou anti-M2. Cette nomenclature indique que d'autres Ac anti-mitochondries ont été décrits, mais les anti-M2 sont les plus spécifiques de la maladie (˜100%) et leur détection est très sensible puisqu'on les rencontre dans 95% des cas.
En réalité, ces anticorps sont dirigés contre la protéine E2 (acyltransférase) de 74 kDa du complexe pyruvate déshydrogénase situé à la face interne de la membrane mitochondriale. On détecte ces auto-anticorps par immunofluorescence indirecte sur estomac, foie et rein de rat, ou par Western Blot. Le cDNA de la protéine E2 ayant été cloné, il est maintenant possible d'obtenir l'auto-antigène sous forme recombinante pour doser les auto-anticorps par ELISA.
Il
n'y a pas de corrélation entre le taux d'anticorps anti-mitochondries et
l'évolutivité de la CBP. Il n'est donc pas nécessaire de faire des dosages
itératifs, au moins par immunofluorescence. Il est possible que les tests ELISA
apportent dans l'avenir plus de précisions.
Figure 1 : Anticorps anti-mitochondrie de type 2.
Photo : B Weill
D - Diagnostic anatomo-pathologique
En revanche l'analyse anatomo-pathologique permet d'évaluer le stade évolutif de la maladie selon 4 étapes:
1) destruction des canalicules biliaires intra-hépatiques avec réaction inflammatoire
2) prolifération des néocanalicules
3) fibrose
4) cirrhose.
Figure 2 : Infiltration des canalicules biliaires au cours de la CBP.
Photo : Immunologie clinique, 1991, J. Brostoff, Ed DeBoeck Université
E - Physiopathologie
La cause déclenchant la CBP n'est pas connue. Une hyperexpression des molécules de classe II du CMH sur l'épithélium biliaire au début de la maladie suggère que les cellules fonctionnent, à ce stade, comme présentatrices d'auto-antigènes. Mais ces anto-antigènes sont inconnus. Il est possible, mais non prouvé, qu'ils aient des épitopes croisés avec la molécule E2. De toute façon, on ignore aussi si les Ac anti-mitochondries ont ou non un rôle pathogène.
II – Hépatites auto-immunes
La présentation clinique des hépatites auto-immunes ne diffère pas de celle des hépatites aiguës virales mais elles sont beaucoup plus rares et le diagnostic différentiel est souvent fait lors du passage à la chronicité.
A - Hépatite auto-immune de type I
Elle survient le plus souvent avant 20 ans et évolue généralement vers l'insuffisance hépato-cellulaire chronique avec ou sans cirrhose.
1) Diagnostic
biologique
En dehors des signes habituels de cytolyse hépatique comme l'élévation des ASAT et des ALAT, on note une hypergammaglobulinémie souvent supérieure à 30g/l et prédominant sur les IgG.
2) Diagnostic
immunologique
On détecte aussi assez fréquemment des anticorps antinucléaires, mais jamais d'Ac anti-ADN natif. Il arrive aussi que l'on détecte de faibles taux d'Ac anti-mitochondries de type 2. Les auto-anticorps les plus caractéristiques sont les anticorps anti-fibres musculaires lisses détectés par immunofluorescence indirecte sur la musculeuse de l'estomac de rat. Il s'agit en réalité d'Ac anti actine. Ces anticorps doivent être distingués des Ac anti-vimentine observés parfois dans les hépatites virales et qui peuvent aussi réagir avec le muscle lisse. Il n'y a pas et d'Ac anti-actine au cours des hépatites virales. Le diagnostic différentiel entre Ac anti actine et Ac anti-vimentine peut être fait soit par immunofluorescence indirecte sur cellules Hep-2 soit par ELISA en utilisant les protéines purifiées.
La confirmation du diagnostic doit être faite par biopsie.
Figure 2 : Anticorps anti-muscle lisse.
Photo : B Weill
B - Hépatite
auto-immune de type II
Elle est beaucoup plus rare que le type I et s'observe chez l'enfant entre deux et quinze ans. Elle est souvent associée avec d'autres maladies auto-immunes comme le diabète insulino-dépendant, le vitiligo, la thyroïdite de Hashimoto, ou la maladie de Basedow. Elle évolue assez rapidement vers la cirrhose.
1) Diagnostic biologique: cf hépatites auto-immune de type 1.
2) Diagnostic immunologique
Il n'y a ni anticorps anti-nucléaires ni anticorps anti-mitochondries, mais on détecte des anticorps anti-réticulum endoplasmique de type 1 ou anti LKM-1 ("Liver-Kidney Microsomes") par immunofluorescence indirecte sur foie et rein de rat. Les anticorps réagissent en réalité avec le cytochrome P-450 II-D6. Le diagnostic doit être confirmé par une biopsie.
Figure 3 : anticorps anti-LKM-1
Photo : B Weill
C - Hépatites
auto-immunes médicamenteuses
Les médicaments les plus souvent impliqués sont: la clométacine, la méthyldopa, la papavérine, la nitrofurantoïne, le fénofibrate, la benzasone qui ne sont pas particulièrement hépato-toxiques. Devant une hépatite aiguë chez un patient prenant un traitement médicamenteux, aucune molécule ne peut être innocentée à priori dans la génèse de la maladie. Les médicaments doivent donc être arrêtés ou remplacés par des molécules appartenant à d'autres familles pharmacologiques.
La clinique et les signes biologiques sont identiques à ceux des autres hépatites aiguës.
Comme dans les hépatites auto-immunes de type I, on observe des Ac anti-fibre musculaire lisse. Il faut connaître le cas exceptionnel de l'hépatite à l'acide tiénilique qui entraîne l'apparition d'anticorps anti-réticulum endoplasmique de type II (anti-LKM-2) qui reconnaissent le cytochrome P-450 II C8-10.
D - Hépatites
médicamenteuses immuno-allergiques
Ce ne sont pas réellement des hépatites auto-immunes car
elles surviennent après une prise de médicament hépato-toxique. Elles
s'accompagnent cependant d'auto-anticorps anti-hépatocytes commune on en
observe dans l'exemple typique que constitue l'hépatite à l'halothane. Ces
anticorps dirigés contre un antigène de 59 kDa du réticulum endoplasmique,
peuvent lyser les hépatocytes par Cytotoxicité dépendante des anticorps. Cet
antigène apparaît après traitement des cellules par l'halothane.
Tableau 1 : Maladies auto-immune du foie et des voies biliaires
|
Hépatite auto-immune de type 1 |
Hépatite auto-immune de type 2 |
Cirrhose biliaire primitive |
Signes Cliniques |
Age de début : 8-20 ans / 0-50 ans Prédominance féminine Début aigu Ictère |
Age de début : 2-14 ans Prédominance féminine Début aigu Ictère 5 fois plus rare que l’HAI de type 1 |
Age de début : 30-70 ans Prédominance féminine Début insidieux Ictère progressif Prurit précédent l’ictère |
Signes Biologiques |
Cytolyse hépatique- ASAT, ALAT ↑↑ (10xN) - PAL N Insuffisance hépatocellulaire- Hypoalbuminémie - Diminution du TP - Diminution du facteur V |
Cytolyse hépatique- ASAT, ALAT ↑↑ (10xN) - PAL N Insuffisance hépatocellulaire- Hypoalbuminémie - Diminution du TP - Diminution du facteur V |
Destruction des canaux biliares- PAL ↑↑ - Bilirubine ↑↑ Pas de cytolyse hépatique- ASAT, ALAT N ou légèrement ↑ Pas d’IHC- TP Normal |
Signes
Immunologiques |
Ac anti-muscle lisse- Ac anti-actine positifs - Ac anti-vimentine négatifs Hypergglobulinémie>40g/l - Hyper IgG |
Ac anti-réticulum endoplasmique(Ac
anti-LKM1) -
Ac
anti-cytochrome P450 2D6 Hypergglobulinémie>20-30g/l - Hypo IgA |
Ac anti-mitochondrie de type 2- Ac anti-pyruvate deshydrogénase Hypergglobulinémie>15-20g/l - Hyper IgM |
Associations |
|
Diabète Thyroïdite |
Sclérodermies, Sjögren Thyroïdite |
Traitement |
Corticoïdes Immunosuppresseurs |
Corticoïdes Immunosuppresseurs Transplantation hépatique |
Corticoïdes Immunosuppresseurs Transplantation hépatique |
III – Diabète insulino-dépendant auto-immun
A - Clinique
Le diabète insulino-dépendant auto-immun est dit "juvénile" car il survient le plus souvent chez l'enfant de 11-12 ans ou le jeune adulte. Il succède parfois à un épisode infectieux banal et commence souvent de manière spectaculaire par un coma acido-cétosique. Les complications les plus graves sont la rétinopathie, la néphropathie et l'artériopathie diabétiques
Le diagnostic repose sur l'hyperglycémie, la glycosurie et, en cas d'acido-cétose, sur les perturbations hydro-électrolytiques caractéristiques.
B - Diagnostic immunologique
Si le diagnostic de diabète repose sur des données biochimiques, son caractère auto-immun repose sur la détection d'auto-anticorps dans le sérum du patient.
Il s'agit essentiellement des anticorps suivants:
anticorps anti-insuline,
- anticorps anti-cellules β_des ilôts de Langerhans, reconnaissant une protéine de 38 kDa. Ces anticorps, d'isotype IgG et fixant le complément, peuvent apparaître avant le début du diabète.
- anticorps anti-GAD
(décarboxylase de l'acide glutamique). Cet auto-antigène possède un épitope
croisé avec un virus coxsackie, ce qui a fait incriminer une infection virale à
l'origine du processus auto-immun.
Figure 4 : anticorps anti-Ilôts de
Langerhans
Photo :
Immunologie, 1990, I. Roitt, Ed Pradel
C - Physiopathologie
1) Modèles
expérimentaux
Les deux modèles les plus couramment étudiés sont les diabètes spontanés du rat BB (Bio Breeding) et de la souris NOD ("Non Obese Diabetic"). dans les deux cas la maladie commence vers l'âge de 3 mois et la presque totalité des animaux devient diabètique.
La prédisposition du rat BB et de la souris NOD est d'origine génétique, liée à la présence de gènes d'histocompatibilité de classe II particuliers: RT1u chez le rat BB, et I-Ag7 chez le souris NOD. Au début de la maladie, les ilôts de Langerhans sont infiltrés (insulite) par des cellules inflammatoires (macrophages, cellules dendritiques) et des lymphocytes TCD4 +, bientôt suivis par des lymphocytes T CD8 +. Le pouvoir cytotoxique de ces derniers joue un rôle majeur dans la survenue du diabète.
En effet, le diabète apparaît avec la destruction des cellules Βêta des ilôts de Langerhans, observable au fur et à mesure que progresse l'infiltrat inflammatoire . La maladie expérimentale peut être prévenue grâce à une thymectomie ou l'injection d'anticorps anti-lymphocytes T.
Le
diabète insulino-dépendant du rat et de la souris est souvent associé à une thyroïdite
auto-immune.
Figure 5 : Infiltration lymphocytaire des ilôts de Langerhans (insulite)
au cours du diabète.
Photo : Immunologie clinique, 1991, J. Brostoff, Ed DeBoeck Université
2) Chez
l'homme
La prédisposition génétique est nette, avec une grande fréquence de cas familiaux. Le rôle des Ag HLA de classe II dans cette prédisposition se traduit par l'élévation du risque relatif de survenue de diabète auto-immun chez les sujets hétérozygotes DR3-DR4. Les sujets DQB1*0302 ayant un acide aminé non chargé en position 57 de la chaîne β, sont prédisposés au diabète de type I. Inversement, les sujets ayant un acide aminé chargé à la même position, sont résistants.
Une insulite avec infiltration lymphoïde des ilôts de Langerhans a été constatée au début de la maladie dans les rares cas où elle a pu être recherchée.
Chez l'homme comme dans les modèles expérimentaux, le diabète auto-immun peut être associé à une autre maladie auto-immune comme la thyroïdite de Hashimoto.
3) Mécanisme
Le rôle des lymphocytes T est primordial. Il est démontré chez l'animal par le transfert adoptif de la maladie par des lymphocytes T spléniques d'une souris NOD diabètique à un receveuse NOD irradiée non malade. Les lymphocytes B, en revanche, sont inefficaces pour transférer le diabète, de même que les auto-anticorps. Les auto-Ac détectés dans le sérum des animaux et des patients ne sont donc pas pathogéniques.
Les lymphocytes T responsables de la maladie ont échappé à l'induction de la tolérance naturelle (par délétion intra-thymique) ou ont perdu l'état d'anergie dans lequel ils étaient maintenus en périphérie.
Il est possible qu'à l'occasion d'un épisode infectieux, éventuellement par un germe possédant des épitopes croisés avec les cellules β des ilôts de Langerhans, des lymphocytes T auto-réactifs perdent leur anergie. Cette modification de leur statut peut se traduire par l'apparition de molécules de co-stimulation à leur surface et à la surface des cellules β sous l'effet de cytokines comme l'IL-1, le TNFa et l'IFN g produits au cours de l'infection. Il est aussi possible, comme l'ont montré les expériences sur les souris transgéniques exprimant une glycoprotéine du virus LCMV (cf chapitre "physiopathologie de l'auto-immunité"), que les auto-antigènes des cellules β soient habituellement ignorés du système immunitaire jusqu'à ce que celui-ci soit stimulé par un agent infectieux ayant un épitope croisé.
L'agression des ilôts par les lymphocytes T CD8+ aboutit à la destruction des cellules β par apoptose. Des cellules NK et des macrophages recrutés par les cytokines pro-inflammatoires qui augmentent l'expression membranaire des molécules d'adressage (intégrines, adressines, selectines) et la production de chimiokines interviennent aussi dans la destruction des ilôts de Langerhans et le déclenchement du diabète.
D - Traitement
Le traitement du diabète auto-immun repose avant tout sur l'insulinothérapie et la diététique. Le traitement de la composante auto-immune de la maladie fait encore l'objet de recherches. Différents protocoles thérapeutiques sont à l'étude:
- utilisation d'anticorps monoclonaux bloquant les TCR auto-réactifs, les molécules de co-stimulation (CD4, B7) ou les interleukines pro-inflammatoires,
- utilisation de cytokines anti-inflammatoires et immuno-suppressives (Il-4, Il-10).
IV – La thyroïdite auto-immune de Hashimoto
A - Rappel clinique
La thyroïdite de Hashimoto commence par un goitre diffus, homogène, et euthyroïdien pendant plusieurs années. Elle est nettement plus fréquente chez la femme que chez l'homme et survient généralement entre 20 et 30 ans. Le goitre peut ensuite devenir nodulaire et une hypothyroïdie se développe progressivement.
B - Diagnostic biologique
Le diagnostic biologique d'hypothyroïdie se fait grâce au dosage des hormones thyroïdiennes et thyréotropes. L'hormone T4 est abaissée et la TSH est élevée.
C - Diagnostic immunologique
Le caractère auto-immun de la thyroïdite est établi grâce à la découverte de différents auto-anticorps:
· anticorps anti-thyoglobuline dosés par hémagglutination passive ou plus souvent par ELISA,
· anticorps anti-microsome de la thyroïde détectés par immunofluorescence indirecte sur coupes de thyroïde
Figure 6 :
anticorps anti-Thyroglobuline
Photo : Immunologie clinique, 1991, J. Brostoff, Ed DeBoeck Université
Figure 7 : anticorps anti-microsome
de la thyroïde
Photo : Immunologie clinique, 1991, J. Brostoff, Ed DeBoeck Université
D - Diagnostic anatomo-pathologique
Le diagnostic requiert exceptionnellement la pratique d'une biopsie, sauf quand il y a une hésitation avec un nodule cancéreux ou un lymphome. Au cours d'une thyroïdite auto-immune, la biopsie montre une infiltration lymphocytaire dense avec constitution de formations lymphoïdes et destruction progressive des follicules thyroïdiens.
E - Physiopathologie
1) Les modèles expérimentaux
Les poulets de la souche White Leghorn font une thyroîdite spontanée qui leur vaut la dénomination de "poulets obèses". Une thyroïdite auto-immune spontanée apparaît aussi chez le rat Buffalo et le rat BB atteint, d'autre part, d'un diabète auto-immun de type I.
On peut induire une thyroïdite auto-immune expérimentale " (TAE) chez le lapin et la souris, en injectant de la thyroglobuline associée à de l'adjuvant de Freund. La maladie expérimentale se traduit cliniquement par une hypothyroïdie et histologiquement par une infiltration lymphocytaire de la thyroîde et une destruction progressive des follicules. L'infiltrat est d'abord constitué de lymphocytes T CD4+, puis les lymphocytes T CD8+ s'accumulent et finissent par prédominer et détruire le parenchyme thyroïdien. La TAE peut être transférée à un animal syngénique, grâce à l'injection de lymphocytes T spléniques d'un animal atteint de TAE. Chez la souris, les Ac anti-thyroglobuline sont majoritairement de type IgG1 et les cytokines produites localement sont essentiellement de l'IFNγ et du TNFα, traduisant une réaction immunitaire de type TH2.
La maladie expérimentale est cyclique, et guérit spontanément.
2) Chez
l'homme
Il existe plusieurs différences par rapport au modèle de TAE:
Tout d'abord la maladie
ne guérit pas spontanément. Elle devient chronique et peut, exceptionnellement,
se compliquer de lymphome à point de départ thyroïdien. Les auto-anticorps
anti-thyroglobuline appartiennent surtout à l'isotype IgG1, et traduisent
plutôt une réaction de type TH1.
Figure 8 : Physiopathologie des
dysthyroïdies auto-immunes : thyroïdite de Hashimoto et maladie de
Basedow.
F - Traitement
C'est le traitement de
l'hypothyroïdie. On n'administre des corticoïdes qu'en cas, exceptionnel, de
goitre inflammatoire.
Tableau 2 : Maladies auto-immune de la
thyroïde
|
Thyroïdite de
Hashimoto
|
Maladie de
Basedow
|
Symptômes Cliniques |
Fatigue Frilosité Gain de poids Dépression Constipation |
Fatigue Sudation Perte de poids Excitabilité Palpitation |
Signes Cliniques |
Goitre Peau sèche Gonflement des
mains et de la face Voix rauque Bradycardie |
Goitre Peau chaude et
moite Exophtalmie Tremblements Tachycardie Fonte musculaire |
Signes Hormonauxs |
Diminution des T3 et T4 Augmentation de la
TSH |
Augmentation des T3 et T4 Diminution de la
TSH |
Signes Immunologiques |
Ac anti-ThyroperoxydaseAc anti-Thyroglobuline |
Ac anti-RTSH |
Traitement |
Substitutif
(L-Thyroxine) |
Anti-thyroïdiens (thionamide) Iode 131 Chirurgie |
V – Maladies auto-immunes de la peau
A
- Pemphigus Vulgaire
Le pemphigus vulgaire est une maladie caractérisé par la perte de cohésion des cellules épidermiques (acantholyse). Il en résulte la formation de bulles intraépidermiques. Les lésions classiques observées au cours du pemphigus vulgaire sont des vésicules fragiles qui s’ouvrent et laissent la peau dénudée. Une friction de la peau chez ces patients induit la séparation du derme et de l’épiderme (signe de Nikolski). Les lésions de pemphigus vulgaire sont retrouvées essentiellement au niveau du crâne, de la face, du cou et du tronc. Chez 50% des patients, les premières lésions ont pour siège la bouche. 90% des patients auront au cours de l évolution de leur maladie des lésion de la muqueuse buccale. Histologiquement, la biopsie au niveau des lésions cutanées montre la formation de vesicules intraépidermiques secondaires à la perte de cohésion des cellules épidermiques. A l’intérieur de la bulle, on observe de nombreuses cellules épidermique acantholytiques, les kératinocytes basaux restant attachés à la membrane basale dermo-épidermique. A l’intérieur des bulles on note la présence d’un infiltrat à prédominance d’éosinophiles.
Les auto-anticorps caractéristiques du pemphigus vulgaire sont visualisés en IFI par un réseau marquant la substance intercellulaire qui joint les kératinocytes. Les auto-antigènes sont portés par les desmosomes et correspondent à une bande de 130 kDa en immuno-blot.
Figure 5 : Pemphigus vulgaire
Photo : Immunologie clinique, 1991, J. Brostoff, Ed DeBoeck Université
Figure 6 : anticorps anti-substance intercellulaire
Photo : B Weill
B - Pemphigus Foliacé
Le pemphigus foliacé se distingue du pemphigus vulgaire par divers aspects : les lésions acantholytiques sont localisées à l’intérieur de l’épiderme juste sous le stratum corneum. Ce sont donc les zones les plus superficielles de l’épiderme qui sont touchées. La distribution des lésions est identique à celle observée au cours du pemphigus vulgaire, à l’exception de l’atteinte muqueuse qui est rare dans le pemphigus foliacé. Les bulles sont rares, souvent remplacées par des érosions superficielles associées à un érythème. L’IFI montre un aspect semblable à celui du pemphigus vulgaire, mais l’immuno-blot révèle une bande de 160 kDa.
C
- Pemphigus Paranéoplasique
Le pemphigus paranéoplasique est une maladie autoimmune de la peau recement decrite associant une acantholyse intra-épidermique avec un syndrôme paranéoplasique. Les patients atteints de pemphigus paranéoplasique montrent des lésions érosives douloureuses touchant essentiellement les muqueuses, associées à des éruptions papulo-squameuses prurigineuses évoluant souvent vers la formation d’une bulle. L’IFI montre un aspect semblable à celui du pemphigus vulgaire, mais l’immuno-blot révèle des bandes de 210, 230, et 250 kDa. Il s’ajoute parfois une bande de 190 kDa.
D
- Maladies de la jonction dermo-épidermique
1) la
Pemphigoïde Bulleuse
La pemphigoïde bulleuse est une maladie auto-immune touchant préférentiellement les sujets âgés. Les lésions épidermiques sont constituées de bulles tendues apparaissant sur un fond urticarien ou eczémateux. Les lésions touchent d’abord les membres et s’étendent au tronc. Les lésions buccales sont présentent dans 10 à 40% des cas. Au cours de l’évolution, les bulles tendent à se rompre et sont remplacées par des lésions érosives. Histologiquement, on observe des bulles subépidermiques remplies d’un liquide inflammatoire riche en polynucléaires éosinophiles et neutrophiles. L’IFI montre une fluorescence continue de la membrane dermo-épidermique et l’immuno-blot un doublet de 220-240 kDa associé à une bande de 180 kDa.
Figure 7 : Pemphigoïde bulleuse.
Photo : Immunologie clinique, 1991, J. Brostoff, Ed DeBoeck Université
Figure 8 : anticorps anti-membrane basale dermo-épidermique.
Photo : B Weill
2)
l’Epidermolyse Bulleuse Acquise
Cette maladie bulleuse se caractérise sérologiquement par des auto-anticorps qui se fixent sur la membrane basale dermo-épidermique comme on peut le voir en IFI. La microscopie électronique et le western blot ont montré que l’auto-antigène spécifique était situé sur le feuillet dermique de la membrane basale et qu’il était constitué de collagène de type VII.
3) la
Pemphigoïde Cicatricielle
L’IFI a le même aspect que dans la pemphigoïde bulleuse, mais l’immuno-blot ne révèle qu’une bande à 180 kDa.
E
- Herpes gestationnel
L’herpes gestationnel est une dermatose bulleuse auto-immune rare touchant les femmes enceintes. L’herpes gestationnel peut débuter à n’importe quel trimestre de la grossesse. Les lésions sont retrouvées sur l’abdomen, le tronc et les extrémités, les lésions des muqueuses sont rares. Les lésion cutanées sont polymorphes et consistent en papules erythémateuses, des vésiculo-papules voir des bulles. Les lésions sont très prurigineuses. Des exacerbations sévères de la maladie sont fréquentes après l’accochement, typiquement dans les 24-48 heures. Bien que l’herpes gestationnel ne représente pas de risque majeur pour le fœtus. On note seulement une augmentation du risque de prématurité et un léger retard de croissance. De façon occasionnelle, les enfant de mère atteint d’HG peuvent présenter des lésions cutanées transitoires.
Le diagnostic immunologique est fait comme pour les autres dermatoses bulleuses par IFI sur oesophage de rat. L’herpes gestationnel est caractérisé par le dépôt linéaire de C3 le long de la membrane basale. Il est mis en évidence à l’aide d’un AC anti-C3 humain.
F - La dermatose lineaire à IgA
Cette
affection, longtemps considérée comme une forme voisine de la dermatite
herpétiforme, est aujourd’hui une dermatose bulleuse bien délimité.
Cliniquement, les patients présentent des lésions bulleuses sous-épidermiques
semblables à celles observées au cours de la pemphigoïde bulleuse.
Figure 7 : Localisation des antigènes cibles au cours des maladies auto-immunes
de la peau.
Figure 8 : Diagnostic différentiel des maladies auto-immunes de la peau
par Immunofluorescence.
Figure 8 : Diagnostic différentiel des maladies auto-immunes de la peau
par western blot.
Tableau 3 : Tableau récapitulatif des auto-anticorps
spécifiques d’organes
Tissu ou organe cible |
Maladie |
Auto-anticorps |
Hématies |
Anémie hémolytique auto-immune |
Anti-hématies |
Plaquettes |
Purpura thrombopénique Auto-immun |
Anti-plaquettes |
Polynucléaires neutrophiles |
Granulopénie auto-immune |
Anti-polynucléaires |
Thyroïde |
Thyroïdite de Hashimoto Maladie de Basedow |
Anti-thyroperoxydase Anti-thyroglobuline Anti-récepteur de la TSH |
Pancréas |
Diabète insulino-dépendant |
Anti-cellules bêta des ilôts Anti-GAD |
Cortico-surrénale |
Insuffisance surrénalienne |
Anti-cortico-surrénale |
Hypophyse |
Panhypopituitarisme |
Anti-anté-hypophyse |
Muscles striés |
Myasthénie |
Anti-récepteur de l’acétyl-choline |
Epiderme |
Pemphigus vulgaire Pemphigoïde bulleuse |
Anti-substance inter-cellulaire Anti-membrane basale |
Rein |
Syndrome de Goodpasture |
Anti-membrane basale glomérulaire |
Estomac |
Gastrite atrophique auto-immune |
Anti-cellules pariétales |
Foie |
Hépatite auto-immune type I Hépatite auto-immune type II Cirrhose biliaire primitive |
Anti-muscle lisse. Anti-reticulum endoplasmique. LKM1 Anti-mitochondries de type 2 |
Intestin |
Maladie coeliaque |
Anti-réticuline Anti-gliadine Anti-endomysium Anti-transglutaminase |
Système nerveux périphérique |
Neuropathie périphérique sensitive à IgM monoclonale Neuropathie périphérique motrice |
Anti-MAG Anti-gangliosides (GM1) |